lundi 23 juillet 2018

Affaire Alexia : le détail des trois versions de Jonathann Daval

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Combien d’épaisseurs revêt ce dossier criminel ? Une chose est certaine : au cœur des premières battues lancées le 28 octobre dernier sur les traces de « la joggeuse » Alexia Daval, dont la disparition avait été signalée par son mari Jonathann quelques heures plus tôt, il était impossible d’imaginer le millefeuille judiciaire et médiatique qui se dessinait alors.
Lorsque fin janvier, l’époux éploré avait fini par craquer, avouant le meurtre « par accident » de son amour de toujours, on pensait l’enquête globalement close. Et tout mystère éventé, à l’exception notable de la calcination du corps, niée par l’intéressé. Le 27 juin, Jonathann Daval est pourtant revenu sur ses déclarations, accusant son beau-frère d’avoir commis l’irréparable, et sa belle-famille d’avoir conclu un pacte de silence. Ces derniers ont vivement réagi, s'offusquant d'être ainsi mis en cause.
Un choc pour l’opinion publique, qui s’est immiscée sans retenue dans les rouages de cette sordide affaire. Le juge d’instruction et les gendarmes ont-ils eux aussi été désarçonnés ? Difficile, là, de l’affirmer. Bien sûr, des vérifications vont être menées, mais selon des sources proches du dossier, la parole si fluctuante de Jonathann Daval semble avoir perdu toute légitimité à leurs yeux. Surtout, aucune de ses trois versions - que nous livrons ci-dessous dans le détail - ne correspond aux constatations médico-légales effectuées sur le corps. S’il est convaincu de l’implication du mari d’Alexia, Me Florand, avocat des parties civiles, peine à croire qu’il a agi seul... Jusqu’à présent, les enquêteurs ont pourtant écarté toute complicité éventuelle.
Sauf énième rebondissement de cette nature, ou une très hypothétique confrontation entre le mis en examen et ceux qu’il accuse, il est à craindre que le futur procès aux assises se tienne sans autre élément probant que ceux déjà connus, même si les expertises psychiatriques sont attendues avec impatiences. Loin d’être facilitée par Jonathann Daval, « l’homme aux trois visages », la manifestation de la vérité s'annonce tortueuse. Et douloureuse.

28 octobre 2017 : le jogging fantôme

Toute la France a cru Jonathann, quand il explique qu’Alexia est partie courir ce matin-là. Dès le samedi, le mari est entendu deux fois par les gendarmes : à 12 h 22 quand il se présente à la brigade de Gray pour signaler sa disparition, puis vers 18 h. Il décrit le parcours de footing habituel. Il se confie aussi sur les soucis intimes du couple, le traitement médical que prenait Alexia pour ses difficultés à tomber enceinte, ainsi que les « crises » que cela provoquait parfois chez elle. Si, selon lui, une de ses crises a eu lieu le vendredi matin, expliquant les lésions visibles sur ses bras, la soirée raclette chez les parents d’Alexia a été calme.
« Elle s’est bien passée. Nous sommes partis vers 23 h 30, Alexia conduisait. En arrivant, elle a donné à manger au chat et fait une lessive. Moi, j’ai fait tourner un lave-vaisselle ». Couchés ensemble. Levés ensemble. « On a petit-déjeuné ensemble, devant la série télévisée’’The Grinder’’ », poursuit-il. Jonathann dit avoir vu sa femme « descendre le seau à compost », puis partir courir. Lui est vu partout à Gray, vaquant à ses occupations, sourire aux lèvres lors d'un bref passage à son entreprise, puis faisant mine de chercher son épouse, avec son beau-frère Grégory Gay. D'abord sur les routes, puis aux urgences de Gray. Il envoie également plusieurs textos à sa femme, pourtant déjà déposée, morte, dans une forêt voisine. 10 h 37 : « Je vais passer par le boulot récupérer l’imprimante pour notre voisin, ne m’attends pas pour la douche ». 10 h 42 : « Toujours en train de courir. Je vais au verre vider les cadavres que tu bois. lol. Bisous à toute à l’heure, je t’aime ». 11 h 04 : « Tu es rentrée ? Je vais arriver ». Alexia n’est jamais rentrée, ni même jamais partie. Durant trois mois, masque d’époux éploré sur le visage, Jonathann restera drapé dans ce tissu de mensonges.

30 janvier 2018 : les aveux en larmes

Coup de tonnerre. La veille, le mari d’Alexia a été interpellé et placé en garde à vue. Plusieurs auditions se succèdent. Les éléments incriminants - sa voiture qui a bougé durant la nuit fatidique, les traces de pneus relevées à côté de la dépouille d’Alexia, le corps recouvert d’un drap appartenant au couple - s’accumulent, la pression augmente, l’heure tourne… Soudain, Jonathann craque et avoue le meurtre aux enquêteurs. En pleurs, il renouvelle dans la foulée ses déclarations devant la juge d’instruction.
Voici quelques extraits : « Je n’ai pas voulu ce qui est arrivé, ce n’était pas volontaire. Elle a eu une crise extrêmement violente, j’ai voulu faire comme d’habitude, la serrer fort dans mes bras pour qu’elle ne me frappe pas et là, c’était vraiment très fort. On était dans la chambre, je l’ai mise sur le lit et maintenue contre moi, et sans le vouloir, je l’ai étouffée ». Il décrit la suite : « J’ai voulu vous appeler vous, les gendarmes, mais non, ce n’était pas possible. Je n’y croyais pas. J’ai espéré, je voulais qu’elle se réveille. Ensuite, je l’ai recouverte d’un drap par dignité. J’ai pris pas mal de cachets, et je l’ai déplacée le matin au réveil. » Dans la voiture. « Je savais qu’il y avait un tracker, mais je m’en foutais, je ne savais pas où j’allais exactement, j’ai tourné dans ce bois à l’improviste ». Où il a déposé le corps. « Je lui ai remis ses lunettes sur le visage. » Il explique avoir roulé encore, vite, sans réfléchir, « je voulais me foutre en l’air, mais c’était trop dur. Je suis désolé de vous avoir occasionné tout ce travail ». Le SMS envoyé depuis le portable d’Alexia à sa sœur à 9 h 13 ? « C’est moi qui l’ai rédigé ». Il renouvellera ces aveux le 9 mars dans le bureau du juge.

27 juin 2018 : le pacte familial

Placé en isolement, Jonathann Daval s’effondre psychologiquement et physiquement. L’administration pénitentiaire met en place un suivi psychiatrique attentif, et le mari d’Alexia finit par reprendre du poil de la bête. Courant juin, il exprime, via ses avocats, l’envie de parler au juge. Il livre alors une tout autre version de cette tragique nuit du 27 au 28 octobre 2017. La troisième.
À écouter Jonathann, le drame se noue cette fois au domicile des parents Fouillot. Alexia arrive la première de la piscine, encore en tenue de sport. Jonathann, lui, arrive en retard. Très vite, relate-t-il, Alexia pique une violente « crise d’hystérie ». Malgré les efforts de chacun, elle devient « incontrôlable », bousculant au passage l’enfant de sa sœur, Stéphanie. Des gifles volent. La situation part en vrille. Grégory Gay, le mari de la sœur, intervient alors qu’Alexia a quitté le salon. Des « cris » résonnent. Puis plus rien. Lorsqu’il revient, l’homme est blême, selon le récit servi par Jonathann, et avoue aussitôt avoir étranglé Alexia alors qu’il tentait de la calmer.
Panique générale, angoisse absolue. Tous les scénarios sont envisagés par les cinq adultes présents dans la maison. Fébrilement, dans l'improvisation totale, un pacte familial est scellé : on garde le silence. On invente cette histoire de footing. Stéphanie raccompagne Jonathann chez lui. Le lendemain, il dépose le corps de sa femme dans le bois d’Esmoulins et malgré son immense chagrin, se construit un alibi. Dans cette version, il nie toujours avoir tenté de brûler la dépouille d’Alexia. Alors qu’à une centaine de mètres de làhttps://www.estrepublicain.fr/actualite
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lundi 16 juillet 2018

Meurtre d'Alexia : qui est vraiment Jonathann Daval?

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Depuis la disparition d'Alexia Daval le 28 octobre 2017 à Gray, en Haute-Saône, puis la découverte de son corps sans vie et en partie carbonisé deux jours plus tard, les enquêteurs ont eu affaire à trois Jonathann Daval : le veuf éploré qui avait signalé la disparition de sa femme, jamais rentrée de son jogging ; le mari à bout qui a raconté avoir tué sa femme par accident, alors qu'il tentait de la maîtriser pendant une dispute conjugale ; l'homme victime d'un secret familial, celui qui veut qu'Alexia soit morte étranglée par son beau-frère, Grégory Gay, lors d'un dîner familial le 27 octobre, là aussi par "accident".

L'avocat de la famille attend avec impatience les expertises psychiatriques

Difficile pour les enquêteurs de s'y retrouver. C'est la raison pour laquelle maître Jean-Marc Florand, l'avocat des parents d'Alexia, Isabelle et Jean-Pierre Fouillaud, de sa soeur Stéphanie et de son mari Grégory Gay, fait des futures expertises psychiatriques l'une des clés de ce dossier. "Ma priorité est d'obtenir le plus rapidement possible des expertises psychologiques, psychiatriques, des enquêtes de personnalité fouillée pour que l'on nous explique qui est Jonathann Daval", a-t-il ainsi expliqué vendredi à L'Est républicain. "Car aujourd’hui, plus personne ne peut prétendre savoir qui est ce garçon. Nous avons besoin d’une clé de décodage pour pouvoir confronter sa parole à sa personnalité", a-t-il ajouté.
Et de poursuivre : "Ce qui est sûr, c’est qu’on est bien loin du bon garçon affligé par le chagrin, gendre idéal, soumis et docile. Le portrait d’un autre Jonathann, calculateur, froid et machiavélique, qui n’hésite pas à jeter la boue sur les autres pour fuir sa responsabilité, se dessine par touches successives." Des premières expertises psychologiques avaient dépeint un homme animé de traits pervers et capable de "manipulation".

Son beau-frère décrit un homme "machiavélique" et "narcissique"

Stéphanie et Grégory Gay, eux, vont plus loin. Lors d'un entretien diffusé sur BFM jeudi dernier, Grégory Gay, le beau-frère d'Alexia et Jonathann Daval, a décrit un homme "narcissique" et "machiavélique". "Il passe son temps à raconter n’importe quoi, créant cette histoire farfelue, ajoutant du flou dans un dossier déjà très compliqué. Cela nous éloigne de la vérité", avait-il ajouté. Et d'insister : "Je sais maintenant que Jonathann était capable de mentir de manière précise, efficace. On n’avait franchement rien vu venir. Il a réussi à nous duper pendant trois mois. Ma conviction, c’est qu’il n’est pas dingo, mais machiavélique."
De ses relations avec son beau-frère, Grégory Gay a évoqué des "rapports familiaux normaux". "On n'était pas spécialement proches", avait-il ajouté. Les parents d'Alexia, eux, ont longtemps vu en Jonathann le gendre idéal. "Je souhaite à tout le monde d'avoir un gendre comme Jonathann", avait notamment déclaré le père de la jeune femme lors de l'éloge funèbre prononcé aux obsèques d'Alexia le 8 novembre, soit avant les aveux de l'informaticien le 30 janvier.

Issu d'une famille nombreuse et passionné de sport, Jonathann Daval ne s'était jamais fait remarquer

De Jonathann Daval, on sait finalement peu de choses. De nombreux témoins parlent d'un homme discret et gentil. Lors de ses aveux le 30 janvier dernier, son avocat, maître Randall Schwerdorffer, avait même décrit un homme victime des crises de colère de son épouse, décrite comme ayant une "personnalité écrasante" et qui selon lui le rabaissait car le couple n'arrivait pas à avoir d'enfant. "C'est un couple dont malheureusement l'un des conjoints était violent mais ce n'est pas celui auquel on pense", avait-il même ajouté, créant une polémique qui avait fait réagir jusqu'à Marlène Schiappa, la secrétaire d'Etat à l'égalité entre les femmes et les hommes. 
Jusqu'à la mort de sa femme le 28 octobre, Jonathann Daval n'avait jamais fait parler de lui. Originaire de Velet, au sud de Gray, il a grandi au sein d'une famille nombreuse : trois frères et deux soeurs. Son enfance a été marquée par le décès de son père d'un accident cardiaque alors qu'il n'avait que 13 ans. Dans son édition de samedi, L'Est républicain raconte qu'il a ensuite été comme "adopté" par son beau-père. De cette nouvelle union, naîtra un autre enfant.
On laisse dire et on attend la suite des événements
Jonathann Daval connaît une scolarité tout à fait normale et passe son BTS à Besançon, avant de choisir l'informatique. Il est embauché dès 22 ans dans une société à Gray, où il effectue de la maintenance informatique. Passionné de sport, il doit arrêter le foot à cause de ses problèmes d'asthme, et s'adonne ensuite à la course à pied, l'une de ses passions.
Interrogé par le quotidien local, un voisin décrit les Daval comme "des gens bien", "tout sauf des tire-au-flanc". Les parents du jeune homme de 34 ans ne se sont pas exprimés dans la presse, suivant les conseils des avocats de leur fils. "Dans cette histoire, on a tendance à oublier que ce sont deux familles qui sont aujourd'hui dévastées", rapporte l'un de leurs proches, cité par le journal, qui ajoute : "On laisse dire et on attend la suite des événements."
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dimanche 15 juillet 2018

A Velet, la famille de Jonathann Daval "attend la suite" des événements

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Il faut remonter à 1981, et la construction du lotissement des Acacias, pour voir la famille Daval s’installer à Velet, dans l'un de ces nouveaux pavillons. Jonathann naît trois ans plus tard, le 16 janvier 1984, dans une famille déjà nombreuse. Aux côtés de l’aîné, Mickaël, Martine Cussey et Jean Daval ont eu deux autres garçons, Yohann et Cédric, et deux filles, Aurore et Stéphanie.
Une famille "soudée", selon un proche, unie aussi dans le chagrin causé par la mort brutale du paternel. Ouvrier d’usine, Jean succombe d’un accident cardiaque. Jonathann n’a que 13 ans. "Il se confiait rarement sur cette cicatrice qui ne s’est jamais refermée", confie une amie. Comme ses frères et sœurs, Jonathann Daval sera comme "adopté" par Florent, le beau-père, qui travaille dans le bâtiment. Une nouvelle vie, symbolisée par la naissance d'Emeric au sein du couple.
Les études se passent sans heurt, chaque enfant évolue dans des univers professionnels variés. "Tout sauf des tire-au-flanc, des gens bien", jure un voisin. Après un BTS à Besançon, Jonathann, comme son frère Cédric, choisit le secteur de l’informatique ; il n’a que 22 ans quand il est embauché par la société de bureautique et d’informatique Fourot, qui a pignon sur rue à Gray.
Avec son épouse Alexia, dont il est aujourd’hui soupçonné du meurtre, Jonathann partageait la même passion du sport. Il "touche sa bille" au football, qu’il pratique au sein de l’AS Velet-Gray-la-Ville, mais doit y renoncer très jeune, en raison de problème d’asthme. C’est dans la course à pied qu’il retrouve des sensations.
Puis, le drame est arrivé. Du côté du lotissement des Acacias, chez la mère de Jonathann, la vie suit son cours bon gré, mal gré. Martine y poursuit son activité d’assistante maternelle. "Les habitants continuent à orienter les parents vers elle car ils ont toute confiance", souffle un élu du village


jeudi 12 juillet 2018

Alexia Daval : chronologie d'une affaire aux multiples rebondissements

Affaire Alexia : les avocats de Jonathann Daval ''à 300%'' derrière lui

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Le spectaculaire revirement de Jonathann Daval, amorcé le 27 juin dans le bureau du juge d’instruction, a d’ores et déjà fait couler beaucoup d’encre dans les médias. Les réactions dans l'opinion publique sont aussi vives que partagées.
Le meurtrier présumé d’Alexia Daval, qui avait confessé avoir tué son épouse à l’issue de sa garde à vue, fin janvier, est revenu sur ses aveux initiaux. Il accuse désormais son beau-frère, Grégory Gay, d’avoir commis l’irréparable et sa belle famille d’avoir couvert ce terrible secret.
Grégory Gay, qui a déjà formellement démenti ces accusations, devrait livrer sa vérité sur une chaîne d’information en continu ce jeudi soir. Pour mémoire, lui et sa famille sont actuellement parties civiles. Jonathann Daval est le seul mis en examen dans cette affaire.
Plutôt prudents et volontairement discrets au cœur de la tempête médiatique déclenchée la semaine passée par ces révélations, Mes Schwerdorffer et Spatafora durcissent leur axe de défense, en faisant part de leur « optimisme », ce mercredi à L’Est Républicain. Les avocats serrent les rangs derrière leur client.

Une version sérieuse et cohérente »

« Nous soutenons à 300 % la ligne de défense de Jonathann Daval, car nous pensons que sa version est à la fois sérieuse et cohérente par rapport aux éléments du dossier. Nous allons prendre un certain nombre d’initiatives auprès du juge d’instruction, sur lesquelles nous ne communiquerons pas pour l’instant », ont-ils indiqué.
Quelle légitimité apporter à la parole de Jonathann Daval, qui a affiché différents visages et livré plusieurs récits depuis la découverte du corps martyrisé de sa femme, alors même que l’enquête de gendarmerie ne relève - en l'état - aucun élément accréditant sa dernière version ? Une première expertise « psy » versée à la procédure mentionne, selon nos informations, une tendance à la « manipulation » chez l’informaticien. Rien de significatif selon ses avocats : « Cette expertise ne gêne en rien la défense, elle ne remet pas en cause la crédibilité de Jonathann Daval dans ses dernières déclarations. »

lundi 9 juillet 2018

Affaire Jonathann Daval : le suicide d'un homme intrigue l'avocat des parents d'Alexia

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Jonathann Daval est revenu sur ses aveux et accuse désormais son beau-frère d'avoir tué sa femme, Alexia. Les enquêteurs doutent de cette version, qu'aucun élément matériel ne vient appuyer. L'avocat des parents, lui, veut que soit creusée la piste des complicités et s'intéresse au suicide d'un homme retrouvé dans la même zone que la jeune femme. 
Depuis les aveux de Jonathann Daval le 30 janvier dernier, l'avocat de la famille d'Alexia Daval, cette jeune femme dont le corps avait été retrouvé sans vie le 30 octobre à Gray, en Haute-Saône, évoque l'hypothèse de l'existence d'un ou plusieurs complices. Et ce n'est pas le rebondissement de l'affaire la semaine dernière - Jonathann Daval est revenu sur ses aveux et a accusé son beau-frère, Grégory Gay, d'avoir tué son épouse en l'étranglant, alors que la jeune femme faisait une crise d'hystérie - qui a changé quelque chose dans l'esprit de maître Jean-Marc Florand. Face à la chronologie incomplète de la nuit du drame et aux éléments matériels manquants, le conseil, connu pour avoir obtenu l'acquittement de Patrick Dils dans l'affaire des enfants de Montigny-lès-Metz, estime que la piste des complicités n'a pas été suffisamment creusée. 

Un homme retrouvé mort à proximité de là où Alexia a été découverte

Il l'a d'ailleurs dit à plusieurs reprises, avec toujours la même métaphore : "J'ai dit depuis le début de cette affaire que [Jonathann Daval] serait sûrement au générique final du film. Mais je ne sais pas à quelle place." Dans les colonnes de L'Est Républicain samedi, maître Florand ne dit pas autre chose : "S'il [Jonathann Daval] y est pour quelque chose, il a bénéficié de complicités."
Et une affaire obnubile particulièrement l'avocat pénaliste. Il s'agit de la mort de Yannick Chevallier, 38 ans. L'homme a été découvert mort, tué d'une balle dans la tête, le 13 janvier dans un cabanon de jardin à Esmoulins, à proximité de Gray. L'enquête a conclu au suicide, l'homme été dépressif et avait été vu la veille en train de boire. Mais un élément intrigue Jean-Marc Florand : l'arme n'a pas été retrouvée. 
Je n'en démordrai pas tant que je ne disposerai pas des résultats de cette expertise
Les gendarmes, puis le parquet, ont expliqué que l'homme s'était tiré une balle dans la tête, puis avais eu le temps de jeter son pistolet dans une poubelle, avant de s'écrouler quarante mètres plus loin. La poubelle ayant été ensuite ramassée, l'arme du crime n'avait pas été retrouvée. Cette version avait notamment été renforcée par le passé dépressif de l'homme, qui avait déjà tenté de mettre fin à ses jours à trois reprises en l'espace d'un an.
Mais cette version laisse "perplexe" l'avocat des parents d'Alexia, fait savoir L'Est Républicain. Malgré les appels à la prudence du procureur de la République de Vesoul, Emmanuel Dupic qui avait exclu le 25 janvier "en l'état actuel" tout lien entre les deux affaires, l'avocat a demandé que des expertises ADN soient réalisées, pour comparer l'ADN de Yannick Chevallier aux empreintes génétiques retrouvées sur la scène de crime, dans le bois où a été découvert le corps d'Alexia. "Je n'en démordrai pas tant que je ne disposerai pas des résultats de cette expertise", assure-t-il au journal local. A ce jour, les analyses sont toujours en cours.
Interrogée sur LCI en janvier dernier, la femme de cet homme s'était dit "révoltée que le nom de son mari puisse être associé à cette affaire", demandant qu'on "arrête de salir sa mémoire" et assurant que sa famille n'a "strictement rien à voir avec les Daval". "Je ne sais pas qui sont ces gens", avait-elle ajouté.

On ignore toujours l'heure de la mort de la jeune femme 

Parmi les éléments qui posent question : le fait que le corps d'Alexia Daval ait été retrouvé en partie brûlé. A plusieurs reprises, et même du temps de ses aveux, Jonathann Daval a nié y avoir mis le feu. La chronologie, ou plutôt les trous dans la chronologie, de la nuit du drame intrigue également les parents d'Alexia. On ignore par exemple l'heure exacte à laquelle la jeune femme est morte. Tout comme on ignore l'identité de celui qui conduisait le véhicule qui a déposé le corps dans le bois, la seule certitude étant qu'il s'agit de la voiture de fonction de Jonathann Daval.
Par ailleurs, les résultats de l'autopsie établissent des faits qui ne correspondent pas aux versions données par le mari, car Alexia Daval présentait, en plus d'un étranglement, cinq traumatismes crâniens, occasionnés par des coups de poing.
Face à sa nouvelle version des faits, de nouvelles expertises vont être réalisées. L'Est Républicain précise que la téléphonie des parents d'Alexia, de sa soeur Stéphanie et du mari de celle-ci Grégory Gay, va être examinée, afin de savoir où tous se trouvaient le soir du drame, le 27 octobre 2017. Leur avocat estime que des recherches pourraient également être effectuées au domicile des parents, puisque selon Jonathann Daval, c'est là finalement que la jeune femme serait morte, et non au domicile conjugal. Les enquêteurs pourraient notamment y chercher d'éventuelles traces de sang.
On ne sait pas s'il est dingo, s'il couvre une autre personne ou si la vérité est pour lui beaucoup trop lourde à porter
Parallèlement, de nouvelles expertises psychologiques vont être effectuées sur Jonathann Daval. Selon l'avocat des parents, ses nombreux revirements - il avait d'abord joué les veufs éplorés, avant d'avouer avoir tué sa femme par étranglement en tentant de la maîtriser et alors qu'ils se disputaient, puis finalement d'accuser son beau-frère - posent la question de ses éventuels troubles psychologiques. Lors d'une conférence de presse jeudi dernier, le conseil s'était interrogé sur le fait de savoir si l'homme n'était pas "dingo".
"On ne sait pas s'il est dingo, s'il couvre une autre personne ou si la vérité est pour lui beaucoup trop lourde à porter", avait-il ainsi dit. "Je connais mon client (...) sa santé mentale est totalement intacte et son discours parfaitement cohérent", avait répondu l'avocat de l'intéressé, maître Randall Schwerdorffer sur France Bleu Besançon. Lui justifie les revirements successifs de son client par la nécessité qu'il avait de digérer la mort de sa femme et d'accepter les faits. 
Dans ce contexte, de nouvelles auditions, de Jonathann Daval mais aussi des membres du clan d'Alexia, sont à prévoir.
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dimanche 8 juillet 2018

La famille d'Alexia, un "clan" très soudé

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"Stoïques et courageux, comme à leur habitude" : ainsi Me Jean-Marc Florand a-t-il décrit l'attitude de ses clients, ce mercredi après-midi, au terme d'une longue audition chez le juge d'instruction. Le magistrat leur a révélé les terribles accusations portées une semaine plus tôt par leur gendre, Jonathann Daval. Seul impliqué, à ce jour, dans le meurtre de leur fille Alexia, celui-ci évoque désormais "un pacte familial" et met notamment gravement en cause l'époux de leur fille aînée Stéphanie, Grégory Gay, qu'il accuse d'avoir étranglé Alexia. Isabelle et Jean-Pierre Fouillot, puis la seule fille qu'il leur reste et leur gendre, ont accusé le coup, recevant sans ciller ces accusations gravissimes qu'aucun élément du dossier, en l'état, ne permet de corroborer.  
Qui sont les parents d'Alexia ? Comment sa sœur Stéphanie et son époux Grégory vivent-ils depuis le drame. L'Est Républicain a enquêté.

" Respectez notre sérénité "

Accrochée derrière le bar, ce message sobre : "Votre silence est le plus beau des hommages. Merci de respecter notre sérénité". Au café-PMU "La Terrasse", que Jean-Pierre et Isabelle Fouillot exploitent à Gray, nul client ne se risque à évoquer la mémoire d’Alexia, si ce n’est quelques "étrangers indiscrets". Généralement, ils finissent par confier à la fin du repas être "venus pour l'affaire" ; ils se voient alors opposer un silence poli.
Car les parents de la jeune femme, tuée au cours de la nuit du 27 au 28 octobre 2017 avant d’être abandonnée dans un bois, à la sortie de cette petite ville de Haute-Saône, ne veulent rien laisser entrevoir de leur peine. "Au début, j’ai voulu tout arrêter et puis je me suis dit : à quoi bon ? Alors, on travaille. On se dit que c’est peut-être mieux que de ruminer seul chez soi.  De toute façon, on n’a pas le choix », nous avait confié Isabelle Fouillot lorsque nous l’avions rencontrée avec son époux, il y a tout juste quatre mois, dans l’arrière-salle de l’affaire d’un ami restaurateur. « On s’épuise au bar, c’est sûr. Peut-être pour ne pas sombrer. Et puis tout à coup, on se met à pleurer. On ne sait pas pourquoi…", avait ajouté son époux, les yeux embués et la voix étranglée.
À la faveur de cette interview, les parents d’Alexia avaient balayé tout sentiment de "haine" ou de "vengeance" à l’égard de leur gendre Jonathann, auteur présumé du meurtre de leur fille. "De la haine ? On en est incapable. Elle viendra peut-être plus tard, on ne sait pas…", confiait la mère d’Alexia. "Se venger de quoi ? Il doit suffisamment souffrir comme ça, ce n’est pas la peine d’en rajouter. C’est sûr, on a été trahis. Mais ce qui nous bousille avant tout, c’est le chagrin", relatait son époux.

"Aucune haine"

À Gray comme dans la France entière, ces propos mesurés, teintés d’humanisme, avaient suscité des sentiments mêlés, entre admiration et incompréhension.
"Jusqu’au bout", les Fouillot ont déclaré croire à l’innocence de ce gendre qu’ils chérissaient "comme un fils". "On croyait à son innocence à 500 %. À aucun moment, nous n’avons douté de lui", évoquaient-ils. Il aura fallu qu’il passe aux aveux, le 30 janvier, après trente-cinq heures de garde à vue, pour que leurs convictions commencent à vaciller.  Et encore…
Un mois était passé, depuis la mise en examen et le placement en détention provisoire de Jonathann Daval et ils semblaient encore perplexes : "On sait qu’il a avoué mais rien de plus. Quelle place occupe-t-il dans le scénario ? A-t-il agi seul ? Le dossier est encore très incomplet, on n’est peut-être pas au bout de nos surprises. On se demande ce qui va encore nous tomber dessus", commentait la maman d’Alexia. Elle ne croyait pas si bien dire...

"Un très bon moment en famille"

Que sait-on à cette heure ? Le drame qui a « brisé leur vie » s’est noué à l’issue d’une de ces soirées en famille que les Fouillot, soudés au point de fonctionner un peu à la manière d’un « clan », aimaient improviser. Dans le pavillon que les parents d’Alexia occupent au bout de l’impasse du 4e Régiment de Chasseurs, où Alexia aimaient inviter ses amis d’adolescence, pour des fêtes au bord de la piscine, toute la famille s’était retrouvée, cette soirée du 27 octobre. « Nous avions organisé une raclette à la maison avec Stéphanie (la sœur d’Alexia), son conjoint Grégory et leur fils, notre petit trésor. Alexia et Jonathann étaient de la partie. Nous avons passé une très bon moment en famille, comme nous en avons eu plein », nous avait rapporté Isabelle Fouillot. De ce qui s’est passé ensuite, les parents d’Alexia ont toujours juré ne rien savoir.

"À la base, nous sommes des ouvriers"

Soucieux de l’image qu’il renvoie, le couple a toujours eu horreur de passer pour « les bourgeois de service » que certains esprits « jaloux » ont voulu décrire. « À la base, nous sommes des ouvriers », insistait Jean-Pierre Fouillot lors de notre entrevue.  « Tout ce qu’ils ont eu et réussi, ils l’ont obtenu à la sueur de leur front. Les Fouillot, ce sont des bosseurs », confirme un proche.
L’univers professionnel du couple a basculé en 2005. Ouvrier chez Thomson, Jean-Pierre Fouillot fait alors partie des 150 salariés licenciés, après les restructurations menées dans l’usine grayloise où le groupe fabrique des composants électroniques pour téléviseurs à tube, et où il a effectué toute sa carrière. Il rebondira en rachetant « La Terrasse », grâce à quelques économies et sa prime de licenciement. Une institution grayloise, sur  la place du 4-Septembre. Employée du supermarché Casino d’Arc-lès-Gray, où elle a  gravi plusieurs échelons jusqu’à devenir responsable des caisses, Isabelle le rejoindra dans cette aventure.  Dès qu’elles le pouvaient, les deux filles du couple, Stéphanie et Alexia, les rejoignaient derrière le bar.  
Dans les propos des clients, souvent présentés comme des « amis », les mêmes mots reviennent : des gens d’une « extrême gentillesse », « très sociables », n’ayant « pas du tout la grosse tête ».

Stéphanie et Alexia, leur "fierté"

Beaucoup dépeignent aussi l’amour fusionnel que le couple nourrissait à l’égard de ses deux filles.
Il y a l’aînée, Stéphanie, 35 ans. « Une personne posée, un peu comme sa maman. Elle ne fait pas de bruit mais n’est pas effacée non plus. Elle a du caractère », décrit une proche. Jeune maman d’un petit garçon,  elle a quitté le cocon familial après avoir réussi le concours de professeur des écoles. Elle s’est installée en région parisienne avec son conjoint Grégory Gay, 36 ans, un fort en thème féru de sciences, devenu astrophysicien, rencontré au lycée Augustin-Cournot de Gray.
Alexia, qui aurait eu 30 ans le 18 février, n’a jamais quitté la Haute-Saône. Après un master en sciences de l’éducation, elle avait rejoint le secteur bancaire et travaillait dans une succursale de Besançon. Elle avait rencontré Jonathann, son futur mari, à la fin de l’adolescence, il y a dix ans. Jonathann était le « copain d’un copain ». Durant deux ans, le couple a vécu chez, puis à côté des Fouillot, avant d’emménager à deux pas de là, dans un pavillon ayant appartenu aux grands-parents maternels d’Alexia, rue Sonjour à Gray-la-Ville. Le jeune couple n’avait pas d’enfant, ce qui était source de conflit. Dans l’entretien qu’elle avait accordé à L’Est Républicain, Isabelle Fouillot avait révélé qu’Alexia, qui prenait un traitement contre l’infertilité, leur avait annoncé être enceinte à la fin de l’été 2017. Mais elle avait « fait une fausse-couche » un mois avant le drame.