mardi 9 juillet 2013

Des drames humains qu'il faut bien juger

«VOUS avez devant vous un citoyen ordinaire », lâche le procureur Jean-Baptiste Bladier s'adressant aux proches de la victime. Puis, se tournant vers le prévenu : « Votre faute est minime, mais suffisante pour être condamné. » À la barre, un Soissonnais de 30 ans. Le 24 décembre, ce préparateur de commandes rentrait de son travail dans l'Oise. Il roulait sur la RN2 en direction de Soissons, au niveau de Coyolles, lorsqu'il a percuté une Golf arrivant en face. Un Laonnois de 35 ans, au volant de sa Volkswagen, est mortellement blessé. Ce dernier se rendait en région parisienne pour passer le réveillon en famille.
Ni alcool, ni stupéfiants
Voici quinze jours, lorsque cette affaire a été examinée au tribunal, les juges ont eu la tâche difficile ; la décision n'a été rendue qu'hier. Délicate parce qu'il n'y a aucun témoin de la scène, si ce n'est le prévenu lui-même. Ce dernier aurait le jour de l'accident spontanément dit aux gendarmes qu'il avait perdu le contrôle de son véhicule. Ce qu'il a nié lors de son audition, ainsi qu'à l'audience. « J'ai vu que sa voiture arrivait vers moi. J'ai mis un coup de volant à droite ; il m'a percuté sur la gauche et je suis parti dans les bois. Mais je ne me suis pas déporté vers la gauche », explique-t-il au tribunal. Il n'avait pas bu d'alcool ni consommé de stupéfiants. Ce jour-là, il s'était levé à 4 heures pour aller travailler au Plessis-Belleville. La veille, il s'était couché « à minuit ou 0 h 30 », d'après ses souvenirs. « Vous aviez environ trois heures du sommeil », lui fait remarquer un juge. « Je n'étais pas fatigué », se défend-il. Le procureur lui rappelle que le point de choc est matérialisé dans la procédure sur la voie de circulation de l'autre véhicule. Preuve selon lui qu'il s'est déporté. Dénégations du prévenu, lui-même blessé dans l'accident. « Ça va très vite, vous êtes sûr de vous ? » insiste le parquet. Une juge lui rappelle ses premiers propos aux gendarmes. « Ça pourrait arriver à tout le monde, malheureusement, dans un moment d'inattention », lui dit-elle. « Quand je conduis, je fais attention », martèle le prévenu. Puis tournant la tête vers les parents de la victime, en pleurs derrière lui : « Je veux présenter mes condoléances à sa famille parce que c'était le jour de Noël. »
« Pas de peine acceptable »
Le parquet a requis trois mois de prison avec sursis. « Que les parties civiles ne pensent pas un instant que j'y mets le prix de la vie de leur proche », insiste le procureur. Pour l'avocat de la défense, Me Lefevre-Franquet, le seul élément à charge est sujet à caution : « Les gendarmes imaginent un scénario du point de choc présumé car il s'est couché tard et qu'il est un peu fatigué. Mais ce n'est pas une preuve. » Dans la procédure, il n'est pas fait mention de débris à cet endroit. Le trentenaire a été relaxé. En revanche, la procédure au civil, celle qui engagera des dommages et intérêts pour les proches, a été jugée recevable.

http://www.lunion.presse.fr/region/des-drames-humains-qu-il-faut-bien-juger-jna3b26n148423

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